Je ne peux m’empêcher de penser à mes nombreux séjours à l’hôpital. Depuis maintenant neuf jours, j’ai une nouvelle hanche à cause de l’arthrite inflammatoire. C’est un cadeau que j’ai reçu quelques mois après mes traitements de chimio, dont l’impact s’était fait sentir surtout dans mes mains : j’ai perdu un os dans une main, et la reconstruction a été douloureuse, mais j’ai continué de travailler. Je dois avouer que je suis un peu fatiguée qu’on me dise : « Tu es tellement jeune pour vivre cela ». Et si je suis fatiguée, c’est peut-être également parce que je suis en voie de guérison ou parce qu’il me manque quatre unités de sang à cause de l’hématome sur le côté de ma cuisse ou de la pompe utilisée en chirurgie. Mais mon mari me cuisine beaucoup de bons plats, et je peux récupérer sachant ça ira mieux… sans qu’une séance de chimio m’attende dès que je me sens un peu mieux. Évidemment, j’ai l’air déséquilibrée avec l’enflure dans ma hanche : on dirait que tout à coup j’ai une silhouette bien courbée. Immobilisée comme je le suis, j’ai les idées plus claires et je suis capable de faire à peu près tout ce que je veux, pourvu que je ne bouge pas, ce qui veut dire des téléconférences et un super remplaçant pour s’occuper de mes patients pendant 6 semaines (un ordre de mon médecin!)
Enfin à la maison mercredi soir, on m’a strictement interdit de me pencher à plus de 90 degrés au niveau de la hanche, car elle pourrait se disloquer. Seule le lendemain, vous pouvez m’imaginer regardant le rouleau de papier de toilette tomber au sol alors que les laxatifs que j’ai reçus commencent à faire effet. Ma pince à long manche a été magique, mon ambulateur a soutenu ma faiblesse du côté droit et m’a permis de me déplacer dans la cuisine durant la journée et j’ai pu me caler dans le fauteuil inclinable que j’avais sorti du sous-sol durant mes traitements de chimio.
Ces défis m’ont permis de réaliser qu’on peut se préparer. Évitez de penser à l’opinion des autres car, au fond, ils aimeraient probablement avoir le courage de faire ce que vous faites. J’ai mis au point ma propre « liste de patiente préparée » :
1. L’ergothérapeute m’a dit de garder mon téléphone sur moi en tout temps – une idée brillante. Je le porte constamment dans une jolie petite pochette rose sur ma poitrine. Je me suis retrouvée quelques fois dans une situation délicate puisque mon cerveau ne veut pas admettre que je ne puisse marcher correctement.
2. Procurez-vous tous les machins qui peuvent vous aider – le soulève-jambe me permet de soulever ma jambe blessée pour la mettre sur le lit, et ma pince de 2 pieds est bien pratique, surtout lorsque je magasine avec un scooter chez Walmart car je peux prendre les choses sur les étagères!!! Une amie m’avait conseillé d’acheter un fauteuil inclinable pour la chimio pour que je n’aie pas l’impression de passer ma journée au lit. Mon chausse-pied à long manche est une solution ingénieuse pour les trois prochains mois de restrictions. Des robes faciles à enfiler évitent des difficultés. Le tabouret dans la douche est super. Une douche fait beaucoup de bien – plus elle est longue, mieux c’est. Assoyez-vous et relaxez-vous, même lorsque vous vous sentez faible. Il y a des camisoles dans les boutiques de mastectomie avec des petites poches pour les drains – je regrette de ne pas l’avoir su avant. Il est très difficile de se procurer ces choses après la chirurgie, donc préparez-vous ; plusieurs endroits feront la livraison gratuitement (imaginez la tête de mon ado lorsqu’il a signé le bon de livraison du siège de toilette surélevé!)
3. Assurez-vous que votre aidant sait où sont vos choses avant la chirurgie. Pas facile lorsque vous êtes à l’hôpital ou étendue sur le dos de lui expliquer comment trouver votre couverture ou votre écharpe favorite – prévoyez où elles seront. Votre aidant peut faire la lessive, mais remettre les vêtements au bon endroit peut être un cauchemar. Nous formons une équipe intéressante – moi avec ma pince pour agencer les chaussettes et mon mari qui les range. Avez-vous pensé aux oreillers? Cinq à sept oreillers bien placés m’ont soutenue la nuit après ma double mastectomie. Organisez les placards, les garde-robes – vous ne pouvez pas tout faire, mais vous pouvez aider ceux et celles qui le peuvent.
4. Matériel d’assistance. Canne, béquilles intelligentes (c’est ce que j’ai – ces béquilles révolutionnaires pour l’avant-bras contribuent à ma mobilité et à ma démarche), ambulateur, ambulateur à plateforme. Ne soyez pas gênée et déplacez-vous. En fait, vous serez surpris de voir à quel point les gens sont prêts à aider. J’ai même magasiné chez Home Depot avec un petit véhicule électrique : j’ai eu un plaisir fou. Trouvez les moyens de ne pas être clouée à la maison.
5. Reposez-vous. Donnez-vous le droit de reprendre des forces. Le système immunitaire s’améliore avec le sommeil et dans mon cas, je dois en plus reconstituer une bonne quantité de globules rouges. La douleur diminue et vous faites le plein d’énergie pour la prochaine tâche.
6. Regardez le tennis. Mon sport favori. Wimbledon est près de mon ancien lieu de prédilection et je n’ai jamais eu la chance de suivre le tennis lorsque je travaillais. Je me souviens que l’été de ma chimio, j’ai acheté le t-shirt par dépit. Aujourd’hui, je ne peux pas jouer au tennis alors je suis devenue une admiratrice. Je m’attends à pouvoir jouer en double un jour, ce qui, entre la hanche et la neuropathie, semble une montagne à franchir. Mais j’en ai déjà franchi une bonne partie…
7. Ce qui m’amène à mon prochain sujet, la physiothérapie et la mise en forme. Avant cette intervention chirurgicale, il ne me restait qu’un sport : la gymnastique aquatique! Pas capable de marcher ou de faire de l’exercice, pas de yoga… alors, autant flotter! J’espère retrouver bientôt mon groupe de gymnastique aquatique et bien sûr, je peux même la pratiquer dans le lac… une nouvelle mode! J’attends de recevoir un congé de mes blessures cette semaine.
8. « Si je peux faire quelque chose pour toi, dis-le-moi. » On vous dit cette phrase avec sincérité, mais vous n’avez pas l’énergie de penser ou, encore, il est plus facile de ne rien faire. Ce site Web vous aidera : http://lotsahelpinghands.com. Il m’a été recommandé à titre de médecin pour mes patients qui vivaient une affection : cancer, perte soudaine, maladie ou accident. Vous pouvez créer une communauté d’aide qui répond spécifiquement aux besoins individuels. Les gens peuvent s’enrôler pour ramener votre enfant de l’école, déposer un repas chez vous, trouver une coiffeuse qui se déplace à domicile, promener le chien… La communauté est approuvée et connue du patient; tout ce que le bénévole a à faire, c’est d’accomplir une tâche pour aider.
9. Prévenez la douleur et les autres symptômes (constipation, nausée). J’utilise une appli appelée Pillboxie, mais il y en a plusieurs autres. Ce n’est pas parce que vous vous sentez bien maintenant que le mal ne reviendra pas. LA SAGESSE, C’EST D’APPRENDRE DE SES ERREURS. Prenez soin de vous.
10. Dites merci. Ces héros qu’on oublie quelquefois ont besoin de l’entendre, car ce sont eux qui ramassent ce que j’échappe et ce que je ne peux reprendre à cause de mon interdit de 90 degrés. Je ne peux pas porter ma tasse de café avec mes béquilles, puis il y a la cuisine, le ménage, et tout ce qui peut aller mal (la loi de Murphy).
11. Le tableau blanc. Il y en a un dans votre chambre d’hôpital – insistez pour que les médecins, les médecins résidents, les infirmières, le chirurgien orthopédique, le physiothérapeute, l’ergothérapeute, l’inhalothérapeute et les membres de l’équipe de douleur indiquent leurs noms au tableau. Vous ne vous souviendrez de leurs noms que quelques minutes avant que vos médicaments vous les fassent oublier définitivement. Ajoutez également la date, parce que vous pouvez perdre le fil des jours. Et à ce propos, ayez aussi un tableau blanc à la maison avec les noms des principaux spécialistes, centres de soins et rendez-vous à venir. Sachez que vous oublierez et de cette façon, vous ne serez pas en colère contre votre cerveau sous chimio.
12. De retour : le savon au bout d’une corde! Cela révèle peut-être mon âge, mais je ne connais pas beaucoup de gens qui aiment réutiliser un savon après qu’il soit tombé dans la douche de l’hôpital. Je ne peux pas aller à l’encontre de mon interdit de 90 degrés et donc, je ne peux ramasser un savon échappé. Achetez un savon géant (le genre qui est trop gros pour tout autre usage) et demandez à un bon ami ou votre conjoint – ou vous-même si vous êtes bricoleuse – de percer un trou dans le premier tiers du savon pour y insérer un lacet de chaussure. Et voilà! Vous vous sentirez fraîche et propre, assise bien en sécurité sur votre tabouret de douche.
Célébrons les possibilités et non les impossibilités, parce que nous sommes des batailleuses et nous devons traverser des difficultés. La résilience grandit avec les épreuves. Nous transmettons de l’inspiration. Laissez les gens vous aider parce qu’ils seront heureux de contribuer.
J’ai décidé maintenant de compter les bons jours. On a tendance à les oublier : c’est une question de perspective.
– Dre Alexandra Ginty